DECOUVERTE DE LOUIN (Deux-Sèvres).

Le mercredi 11 septembre 2024, en partenariat avec Airvault Accueil et l ‘association Richesse et Protection du Patrimoine, l’Office du Tourisme Airvaudais proposait la douzième et dernière sortie de l’été dans le cadre des « mercredis de l’été » : une visite de Louin.

Cette journée sans pluie nous a permis d’allier une randonnée pédestre commentée de 5 km avec plusieurs visites et découvertes mettant en valeur le patrimoine local de LOUIN et de ses villages.

Une vingtaine de courageux randonneurs s’est retrouvée dès 10h00 pour la première visite.

L’ hypogée gallo-romain

L’Hypogée Gallo- Romain découvert en mars 1898, datant du IVème siècle avec sa chambre sépulcrale voutée en plein cintre abritant deux cercueils de pierre : un adulte et un enfant. Plusieurs objets contenus dans la sépulture adulte : une grande et belle amphore et deux pièces de monnaie à l’effigie de deux empereurs romains Alexandre et Constantin, ont permis sans équivoque possible la datation de cet ensemble par le père Camille De La Croix, fondateur de l’archéologie poitevine. Après avoir analysé l’intérieur de ce caveau, le Père de La Croix a entrepris des fouilles sur le pré surplombant l’entrée du site. Après quelques jours de fouilles et de nombreux coups de pioche il fût heureux de découvrir des substructions très complètes appartenant à un temple dont la forme curieuse n’a pas de similaire en France. La suite de cette première découverte fut semée de petits tracas financiers. La rareté des mécènes se termina par l’abandon des fouilles. A la fin du XX siècle de nouvelles fouilles sont entreprises dans la périphérie du temple, après que la végétation ait repris ses droits. Elles permirent de retrouver Les traces du temple et une cinquantaine de sépultures gallo-romaines de l’époque mérovingienne. Cet ensemble dont les Louinais sont fiers a été classé monument historique depuis 1916.

Les canards gras du Cébron

Un petit parcours pédestre nous conduit à l’entreprise d’Emmanuel BRILLOUX «  Les Canards Gras du CEBRON » Ce titre à lui seul sent bon la France. Emmanuel Brilloux nous présente son élevage de canards gras traditionnel qui consiste sur un cycle de 17 jours à réaliser le gavage quotidien à base exclusive de maïs, des canards qu’il reçoit dans son installation d’un autre fournisseur de la filière canard

. Son installation ultra moderne lui permet d’assurer, après l’abattage, la transformation sur place en frais ou en produits élaborés. Il réalise lui-même la commercialisation auprès de ses clients qui sont tous pour la plupart situés dans la région poitevine : restaurateurs, traiteurs, l’épicerie d’Airvault, particuliers, magasins spécialisés en produits frais

Il dirige cette entreprise aidé de deux collaborateurs. Ajoutons qu’il assure également le fonctionnement de son exploitation céréalière.

Productions de la ferme : Foie gras, viande de canards, produits cuisinés (rillettes, pâtés, confits, saucisses sèches)

A vous de jouer !

Le bourg de Louin

La dernière visite de la matinée nous ramène vers le bourg de LOUIN, avec une halte au lavoir de la Guichardière et à sa source (dit le lavoir de l’Arfouilleux). L’occasion est donnée à Bernard de rappeler l’histoire du lavoir en général avec l’objectif affiché de lutter dès les années 1850 contre les épidémies de choléra, de variole, ou de typhoïde qui faisaient de nombreuses victimes en France. Un arrêté gouvernemental, après vote de l’assemblée, fit prendre conscience de l’urgence hygiéniste et permis de subventionner à hauteur de 30% la construction des lavoirs en donnant à chaque municipalité le pouvoir d’encourager et de permettre le lavage du linge hebdomadaire. Cette belle décision fût aussi l’occasion pour les femmes de se retrouver et de discuter pendant ce temps de lessive. Les mauvaises langues ne disent -elles pas que sont nées à cette époque les radios-lavoirs ancêtres de nos radios locales.

C’est l’heure du sympathique pique-nique aux abords de la salle des Fêtes de LOUIN où chacune et chacun apprécie le beau soleil.

Notre après -midi est consacré à la découverte de quelques lieux significatifs du bourg

Le château féodal du XII siècle : propriété des Sauvestre de Clisson puis des Lescure relevait de la Châtellenie de la Ronde aussi paroisse de Louin dont dépendait 28 fiefs, notamment les maisons nobles de Champeau et de la Maduère. Ce château dont il reste deux tours et un escalier extérieur aurait été détruit à la révolution. L’Eglise Saint Martin : La première référence paroissiale de LOUIN apparaît en 1095 confirmée dans les registres de l’Abbaye d’Airvault en 1113. Un pan de mur construit en petit socle et arrasé de briques, visible dans le jardin de la cure pourrait constituer le seul témoignage de l’édifice religieux du Haut Moyen Age. Sur le plan cadastral Napoléonien ci-dessous, on distingue à partir des deux tours du château, (en blanc), le positionnement en bleu de l’église moyenâgeuse qui a été démolie avant la construction de l’actuelle terminée en 1880 (style néo roman).Seuls ont été conservé le clocher donjon et le chœur de cette ancienne église servant aujourd’hui de sacristie.

Où il est question d’un abbé peu commun.

La visite intérieure de l’église Saint Martin de LOUIN a été ponctuée par le récit peu commun de la vie du prêtre administrateur de la paroisse à l’époque de la révolution, l’abbé Pierre René, Marie Cornuault né le 20janvier 1750 à Airvault. Nous sommes en mars 1789, la révolution semble proche. Pour resituer le contexte, deux classes s’affrontent dans le clergé : les évêques et grands vicaires communiquent avec les nobles, les roturiers épousent plus naturellement les intérêts du Tiers Etat dont ils sont issus.

Vous aurez compris que notre curé de l’époque fait partie de la deuxième famille- Le 30 janvier 1790 il lit au prône les lettres patentes du Roi datant de décembre 1789. A la fin de cette messe 117 citoyens de plus de 25 ans procèdent à l’organisation de la nouvelle municipalité. Notre abbé préside cette assemblée en son église, puis fait voter pour faire élire le Maire André Marsault. L’abbé est nommé procureur.- Le 29 juin après la Grand-Messe devant l’autel, on procède à l’appel des volontaires pour servir dans la garde nationale, il en faut 100.

– Le 14 juillet 1790, on plante l’arbre de la liberté juste devant l’église, l’abbé et les habitants font serment « d’être fidèles à la Nation, à la loi et au Roi ». Un feu de joie complète les festivités pour l’anniversaire de la Révolution « qui nous a si heureusement mis en liberté et a juré de maintenir la Constitution »

– La tempête arrive dès le 4 août 1790 : les droits féodaux de l’Eglise sont abolis, les couvents et les ordres contemplatifs sont supprimés, la vente des propriétés ecclésiastiques est décidée.

– Le 11 novembre, on procède à l’inventaire des biens de la cure de LOUIN.- On demande aux prêtres de renoncer à l’exercice antique de la religion.

Cette fois c’en est trop. Le 9 juillet l’abbé se rétracte car il ne veut pas renoncer à l’exercice de la religion. La chute de la royauté rend caduc le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé. L’abbé refuse de prêter le nouveau serment et cesse toute activité religieuse à la fin de l’année 1792. Il n’est plus qu’un officier habilité à recevoir les actes de mariage et décès.

Le mariage de l’abbé…

Profitant d’une nouvelle loi, promulguée le 15 novembre, indiquant que « tout prêtre qui se marie échappe à la déportation et qu’une rente de 800 à 1200 livres lui est allouée ». Que croyez-vous que notre curé fît ? L’abbé Cornuault prend femme le 28 brumaire an II. Il épouse Louise Jaulin. En règle avec la loi, notre abbé peut vivre tranquille…

Après la déclaration de la nullité des objets du culte dans toutes les paroisses de France, les 3 cloches de l’Eglise sont descendues, les ciboires, calices et autres objets du culte sont transportés à Parthenay. Sans matériel, que fit notre curé ? Il renvoie ses lettres de prêtrise. Le 18 septembre 1794, le traitement des ecclésiastiques est supprimé par la Convention. Cette décision semble affirmer que les églises ne sont plus aliénées rendant ainsi le choix aux prêtres de se soumettre aux lois de la république….

…et son divorce.

Une loi sur le divorce, et comme la convention semble assez favorable, que croyez-vous que fit notre abbé ? Il divorce ! Il reprend alors ses fonctions ecclésiastiques et en profite pour célébrer le mariage de son ex-épouse qui décide d’unir son destin à André Marsault l’ancien maire.

A Partir de 1796, l’atmosphère devient plus favorable aux prêtres, mais pas pour longtemps, la convention ne tarde pas à réveiller les lois de 1792 et 1793 contre la religion.

Le 6 septembre 1796, l’abbé est arrêté puis relâché, il prend peur de ces nouvelles suspicions, il cesse toute activité et se cache chez des amis. S’en suit une grande période d’incertitude et de bouleversement dans la vie de l’Eglise et dans l’exercice du Culte.

Une certaine normalisation se met en place et c’est seulement le 7 nivôse an VIII (27/11/1799) que les églises sont rendues au culte. L’abbé Cornuault exerce quelque temps son ministère comme vicaire à Saint Loup sur Thouet du 17 juin 1804 jusqu’au 22 juillet 1807. Ce qui lui donne de nombreuses occasions de retrouver les paroissiens de LOUIN.

Il meurt le 6 juin 1811, curé concordataire de LOUIN.

Toutes les autres informations concernant l’église saint Martin sont réunies sur le panneau « l’histoire de notre église » à l’entrée de celle -ci.

Le blason de Louin : la signification de ce Blason écartelé en croix ; un écu français ancien évoque :

– Les frettés de la famille Pidoux (Françoise Pidoux de la Maduère était la mère de Jean de la Fontaine)

– Les tours représentant notre département : les Deux-Sèvres,

– Les vagues pour le Thouet et l’épi de blé pour l’agriculture,

– La cape et l’épée de Saint Martin, saint du partage et vocable de l’église du village.

Le four banal

Au 7 place Saint Martin, la porte d’entrée de l’ immeuble ayant appartenu à la famille PREST, AURIAULT, et dernièrement à M. Emile GABILLY, donne accès au four banal qui est celui du prieuré de LOUIN. On peut lire sur le linteau de la porte l’ inscription (FOUR Banal du Prieur).

Sur une autre pierre réemployée porte l’inscription (“ C. LAURENCE CONTRUXIT”) avec une date : 1711, Charles LAURENCE était Prieur à cette époque. Ce Charles Laurence est celui qui fit refondre la vieille cloche encore existante. Remontant du système féodal français, les banalités sont des installations techniques que le seigneur avait l’obligation d’;entretenir et de mettre à disposition de tout habitant de sa seigneurie. La contrepartie en est que les habitants de cette seigneurie ne pouvaient utiliser que ces installations seigneuriales, payantes. A la révolution, ces installations (fours à pain, moulins, pressoirs) deviendront communautaires et dont la gestion reviendra à la collectivité.

Les maisons de Vignerons : accueillis par la famille Phan, nous avons pu visiter les trois maisons vigneronnes situées au 2 et 4 rue de la forge.

Les maisons du n°2: Actuellement inhabitées, elles sont répertoriées dans le cadastre napoléonien en 1805 , mais semblent exister depuis le 18ème siècle bien qu’ayant subi des modifications. Elles sont construites sur un fort dénivelé, un versant de la vallée du Thouet, de sorte que ce qui est un étage vue de face, la pièce d’habitation, correspond à un rez-de-chaussée à l’arrière. On accède aux caves de plein pied. L’arrière des caves correspond à une excavation dans la terre. Mais des modifications et déconstructions et reconstructions ont transformé certaines parties en cour intérieure. Les pièces principales d’ habitation au-dessus des caves sont desservies par deux escaliers extérieurs.

Le pressoir « casse-cou »

Au n° 2 dans la cave de gauche, le pressoir d’origine, dit pressoir casse-cou, uniquement composé de pierres, de bois et de corde fonctionnait sans pièce métallique. On reconnaît différents éléments subsistant de ce pressoir à levier .

La pierre : Une plate-forme surélevée de pavés ajustés, bordée d'une murette.Le raisin y est disposé en son centre en pyramide. (la maie) La plate-forme est légèrement penchée vers un orifice par où s’écoulera le jus dans un cuve enterrée. On voit ici le goulot d’évacuation, la bonde.

La fosse recevant la cuve qui récolte le jus a été comblée. On voit aussi une console de pierre où s’emboîtera le treuil en bois. Remarquez le fossile d’ammonite sur le muret.

Le bois : sur le tas de raisin on dispose quatre couches entrecroisées de planches épaisses puis, une poutre parallèle à la console et pour finir, perpendiculairement, la poutre principale (le long fût) qui exercera la pression.

La corde : Autour du treuil une corde s’enroule et le relie à la poutre principale, celle qui exercera la pression. Un trou du diamètre de la corde s’ observe dans le treuil. Sur le mur du fond sont incrustées deux colonnes (les jumelles), dont l’ une fendue verticalement, en pierre qui permettait d’ajuster des clés pour contrôler la hauteur et donc la pression de la poutre principale (le long fût)

Pourquoi ce terme de pressoir « casse-cou » ? Nous observons sur le treuil en bois de très gros trous. Pour manœuvrer le treuil, les ouvriers y introduisaient de longs et solides bâtons, la corde s’enroulait, le long-fut qui y était relié exerçait la pression. Si la corde venait à se relâcher ou à se briser, alors les ouvriers étaient brutalement rejetés en arrière et subissaient ce qu’on appelle « le coup du lapin »

Le pressoir casse-cou a été utilisé du 17ème au 19ème siècle en Poitou.

On peut imaginer qu’au début du 20ème siècle a été introduit dans cette cave le pressoir à vis.

La seconde cave du n° 2, à droite nous laisse les restes d’ un second pressoir casse-cou. La murette a presque disparu, mais le goulot d’évacuation est intact. On observe bien les larges pavés taillés, ajustés et jointés de la plate- forme et la niche contenant les colonnes jumelles qui permettent d’ajuster la hauteur du long-fût (la poutre qui exerce la pression).

La base de la cheminée de la pièce d’ habitation située au-dessus est assez remarquable par son côté artisanal destiné à contrer le passage de la chaleur avec de la terre réfractaire prévenant les incendies. Le sol lui, a été surélevé, la console de pierre est enfouie.

La vigne du n°2 rue de la forge.

La vigne d’ici comme de partout a été dévastée par le phylloxera vers 1885. Une des solutions a été d’adopter des plants résistants. On en voit un spécimen sur la façade de la maison.

Sachez que cette vigne est introuvable dans le commerce. Car elle est insensible au phylloxera, mais encore à toute autre maladie et ne nécessite aucun traitement : ni contre l’oïdium, ni contre le mildiou.

Il s’agit de l’espèce Baco, créée par monsieur Baco en 1902, un hybride de vigne sauvage américaine et de « Blanche folle ». Geneviève Phan en est très contente « J’en ai un grand pied depuis 70 ans qui ne m’a jamais posé aucun problème. »

Fin de partie :

Une journée aussi dense ne pouvait se terminer qu’au CAFE de l’UNION, fleuron du patrimoine local. Les anciens et les habitants actuels savent combien ce lieu est important et riche d’échanges fructueux, d’anecdotes amusantes.

Sylvie Poirier, la patronne de ce lieu, nous a détaillé toutes les activités qu’elle gère : le café, les journaux, les colis en transit départ et arrivée, l’épicerie, le dépôt de pain, en étant toujours à l’écoute de ses clients. Depuis plusieurs mois, aidée par ses parents Bernard son Père et Anne -Marie sa belle-mère, le trio comble les désirs culinaires en offrant un succulent repas du mardi au vendredi midi défiant toute concurrence et régalant à coup sûr les papilles.

Depuis quelques semaines, le café bénéficie du label « La Vélo Francette » répertorié dans les road books des cyclos touristes. L’association « La ruche Louinaise » (composées de bénévoles locaux) présidée par Line vient ajouter un lot d’activités ludiques : tricot-papotage, jeux du dimanche après- midi , confection d’objets de décoration pour Noël, intellectuelles : la dictée du mois, le quizz (franco -Anglais), les stages de langue parlée (franco-anglais) du dimanche matin ; festives : Karaokés périodiques, soirées food-truck, soirées télé (foot, rugby, motos); loisirs : les randonnées pédestres à la belle saison.

Rassurez -vous, la liste n’est pas limitative et peut être enrichie avec l’aide de toutes les bonnes volontés.

Je veux remercier personnellement tous les acteurs et organisateurs de cette belle journée à LOUIN où me semble-t-il la bonne humeur et le plaisir d’une journée ensoleillée se sont complétés.

Bernard

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